Alors que l’on fête l’armistice du 11 novembre, Pierre Brasme révèle une phase cachée de cette période avec son livre “L’Indésirable”.
Un armistice n’est pas toujours synonyme de joie. Le 11 novembre 1918, en Alsace et en Lorraine, on fête la fin de la guerre et de la dictature militaire. Et en coulisse, on expulse la population allemande qui y réside pourtant depuis l’annexion de 1870.
“C’est un sujet qui a longtemps été tabou malgré son ampleur. Un sujet qui ne met pas à l’honneur les autorités françaises”, glisse Pierre Brasme, docteur en histoire spécialiste de la Moselle et président-fondateur de la société d’histoire de Woippy.
La plupart fonctionnaires, commerçants ou enseignants, les Allemands étaient issus pour la plupart du milieu bourgeois mosellan. “Les Lorrains et les Allemands ne se fréquentaient pas. Mais il n’y avait pas de ghetto, précise Pierre Brasme. Les Allemands se sentaient chez eux. Et du jour au lendemain, on leur a demandé de partir”.
Moqués, exclus et surtout indésirables. “L’indésirable”, c’est justement le titre de l’ouvrage que Pierre Brasme a publié cet été, aux Editions des Paraiges. “Je me suis beaucoup intéressé à l’histoire de la première guerre mondiale et sur cette question de la Moselle, explique l’historien. C’est un projet qui a longuement mûrit. Je me suis dit qu’un jour il faudra en parler, dire la vérité sur ce qui s’est passé. Je pense que ce moment est arrivé”.
Son premier roman
Écrit en deux mois, vendu à 700 exemplaires, sur environ 200 pages, “L’indésirable” est aussi le premier roman de Pierre Brasme. Après une vingtaine d’ouvrages historiques, il a préféré dévoiler ce nouveau pan de l’histoire à travers une fiction. “Le roman touche un public plus nombreux que l’écriture historique. C’est moins rébarbatif”, justifie-t-il.
L’auteur y raconte l’histoire de Martha Kaiser, personnage fictif qui aurait pu être un des 50 000 Allemands qui ont quitté la Moselle en 1918. “L’héroïne est une des rares qui décide de faire front. Elle se sent Messine jusqu’au fond du coeur et considère qu’elle n’a aucune raison de quitter son chez-elle. Elle va aussi avoir une histoire sentimentale avec un capitaine français, Robert de Saint-Florent”, résume-t-il.
Le roman comprend deux parties. D’abord, l’héroïne raconte son histoire à la première personne à travers “le journal de Martha Kaiser”. Ensuite, le romancier poursuit l’aventure avec une deuxième partie intitulée “le pont de Kehl”.
« J’ai étudié énormément de documents »
Pour ce faire, l’historien a réuni de nombreuses d’archives et dossiers liés au sort de la population allemande pendant cette période historique. “J’ai étudié énormément de documents fait par les militaires comme des arrêtés d’expulsion ou des demandes de rapatriements. J’ai aussi eu l’occasion de dépouiller certaines archives départementales” ajoute Pierre Brasme.
Dans ce livre, on apprend, entre autres, dans quels cas les “indésirables” étaient priés de quitter la France. “Il y avait deux façons. Soit par une expulsion où ils étaient accusés de tout et n’importe quoi soit leur rapatriement était volontaire. Ils partaient car la pression était trop forte, les menaces étaient insupportables dans un climat de délation”, dénonce Pierre Brasme.
Pour exemple, le romancier raconte l’épisode véridique de la prostituée allemande expulsée pour avoir chanter un hymne allemand sur une place publique.
Grâce à ce livre, Pierre Brasme propose une façon de redécouvrir et d’apprendre une partie de l’histoire autrement, car entre nous, c’est toujours plus facile de lire un roman qu’un livre d’histoire.
Lire les deux premières pages du chapitre 1 « le journal de Martha Kaiser » :
Voir également :
> Pierre Brasme sera présent au salon du livre d’histoire de Woippy samedi 16 et dimanche 17 novembre pour dédicacer son livre.
> Le roman “L’Indésirable” est en vente ici