L’exploration urbaine ne cesse de se démocratiser. Un collectif de Nancy, “Projet urbex”, sillonne le territoire à la recherche de lieux laissés à l’abandon. Leur organisation est minutieuse : la sécurité en point d’orgue.
Au cours de vos périples urbains, peut-être êtes-vous passés devant des lieux laissés à l’abandon… La curiosité vous a piqué, votre réflexion a suivi…“Que se cache-t-il à l’intérieur ?”. C’est la question que se posent tous les urbexeurs. L’exploration urbaine vous permet d’y répondre. « L’urbex » est une pratique qui s’est développée à partir des 1980-1990. Le canadien originaire de Toronto Jeff Chapman, alias « Ninjalicious », a répandu ce terme en contractant le mot « exploration » et l’adjectif « urbain ». Cette activité n’est pas sans risques. Plusieurs accidents graves, parfois mortels sont déplorés annuellement. L’effet de mode qui s’est développé autour de ce phénomène a même incité les urbexeurs à ne plus communiquer les adresses des lieux découverts. Pour préserver leur intégrité et éviter tout acte de vandalisme et de pillage, les lieux doivent rester secrets. Inutile donc de demander une adresse sur un forum ou en commentaire d’une page… Vous n’aurez aucune réponse positive.
Un groupe d’urbexeurs lorrain
L’arrivée des réseaux sociaux a bouleversé énormément de codes, y compris ceux de l’urbex. On compte des milliers de pages destinées à rapporter les diverses découvertes des explorateurs. Certains s’y investissent plus que d’autres, à l’image de Projet Urbex. Cette bande de copains, basée principalement à Nancy, a créé une page Facebook pour raconter ses exploits à toute une communauté. Les urbexeurs lorrains ne détiennent actuellement pas moins de 400 « j’aime ». Afin de se démarquer des nombreuses autres pages, ces passionnés d’histoire ajoutent leur touche personnelle aux contenus parus : l’intégration d’un court récit à chaque publication re-contextualise l’histoire du lieu. Les photos qui alimentent l’album sont retouchées, la teinte bleue est augmentée « pour faire ressortir le côté abandonné ».
Les quatre acolytes de Projet Urbex sont toujours équipés
avant de s’infiltrer dans un lieu abandonné. (Photo : Florent Bibiloni)
Des rôles bien définis
Les explorateurs mettent un point d’honneur à effectuer une préparation minutieuse avant chaque expédition, pour assurer une sécurité optimale. Lampes frontales, panneaux LED, talkies walkies, gopro… Ils rechargent les batteries et c’est parti ! Munis de leurs équipements, ils enfilent leurs chaussures de chasseurs et découvrent les vestiges de l’ancien temps. « Au sein du groupe, chacun a son rôle et son surnom », précise un membre de « Projet Urbex ». “Bear” a toujours un kit de survie dans son sac à dos, prêt à porter main forte à un camarade. Ses brevets de secourisme lui ont appris à préparer un garrot ou un bandage israélien. « Je suis le survivaliste, c’est moi qui apporte les techniques pour l’installation des camps », affirme-t-il. “Climb” mène l’équipe lorsque l’accès est difficile. Il déploie ses cordes d’escalade pour faire passer l’obstacle au groupe.
Ici, « Climb » (à droite) s’apprête à passer à l’action. Corde et harnais sont de rigueur
pour sécuriser sa descente d’une trentaine de mètre. (Photo : Lorène Paul)
“Frog” est le vidéaste de la bande, il monte les vidéos publiées sur les réseaux sociaux et gère la partie informatique. Afin d’augmenter l’efficacité des talkies-walkies, il les programme pour installer les bonnes fréquences. “Récemment, on a acheté des talkies venus de Chine, ils ont une meilleure distance de liaison et sont plus efficaces par rapport à ceux vendus en France. On peut y ajouter une antenne plus longue”, explique-t-il. Enfin, “Fox” coordonne l’équipe tout au long des expéditions. C’est le community manager du groupe, celui qui promeut “Projet Urbex” sur les réseaux sociaux.
Durant les expéditions destinées à repérer des lieux abandonnés,
ils aménagent des bivouacs à la tombée de la nuit. (Photo : Facebook Projet Urbex)
« On est partis en expédition cinq jours »
La maison du pendu, le fort de Frouard, le chateau Keller… Autant de lieux trouvés puis visités par Projet Urbex. Pour s’y rendre, il faut parfois marcher des heures. « On est partis en expédition cinq jours pour trouver un accès à la ligne Maginot en juin dernier. On montait des camps afin de passer la nuit et on repartait explorer la journée », se remémore Fox. De longs moments de recherches sur internet viennent aussi alourdir l’emploi du temps des urbexeurs, avant le passage à l’action. Ils fouillent et trouvent des indices pour avoir un aperçu concret du lieu abandonné. Pas question d’aller sur le terrain la fleur au fusil. Indiana Jones a du souci à se faire…