Si les révélations tardives de Michel Fourniret et Monique Olivier ont récemment permis de faire avancer l’enquête sur la disparition d’Estelle Mouzin, c’est maintenant l’état de santé du tueur en série qui inquiète. Âgé de 78 ans et atteint de troubles neurologiques, “l’ogre des Ardennes” risque d’emporter la vérité dans sa tombe.
C’était il y a 17 ans et pourtant le mystère reste toujours intact, ou presque… Le 9 janvier 2003 la jeune Estelle Mouzin alors âgée de 9 ans n’est jamais rentrée de l’école et les ruelles tranquilles de la petite ville de Guermantes (Seine et Marne) devenaient le théâtre de l’impensable. D’abord soupçonné puis mis en cause, Michel Fourniret, pourtant adepte d’enlèvements et autres atrocités, avait su livrer en 2007, un alibi détournant alors les enquêteurs de la vérité. Mais c’était sans compter sur les déclarations de son ex-femme, Monique Olivier début 2019, révélant avoir couvert son mari le soir de la disparition de la jeune fille. Douze mois plus tard, en mars dernier, le criminel avoue lors d’un entretien avec la juge d’instruction Sabine Khéris, “C’est bien moi, mais vous ne la retrouverez jamais. Je ne sais plus. Vous trouverez peut-être, mais ma mémoire est malade…”
“Il est confus comme une personne âgée”
Depuis qu’il a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, Michel Fourniret a perdu de son glaçant charisme. En octobre dernier sa présence fantomatique lors de la reconstitution de la disparition d’Estelle Mouzin dans les Ardennes, laissait apparaître furtivement un macabé au teint vieillissant et aux cheveux indisciplinés. “Lors des reconstitutions, il avait l’air de ne pas reconnaître les gens autour de lui. Il est confus comme une personne âgée… Il est capable de dire que le café est bon. Et dans la foulée de ne pas se souvenir en avoir bu…” confie un enquêteur présent sur les lieux.
Et la situation ne va pas en s’arrangeant. Le 20 novembre, le “monstre des Ardennes” faisait un malaise dans sa cellule du centre pénitentiaire de Fresnes (Seine-et-Marne). Après avoir été transféré au service réanimation du CHU de Créteil, Michel Fourniret est aujourd’hui conscient mais toujours hospitalisé à l’unité hospitalière sécurisée interrégionale (UHSI) de Paris. Le doute sur une possible contraction de la maladie d’Alzheimer chez le pédocriminel pourrait biaiser les nouvelles fouilles organisées pour retrouver le corps d’Estelle Mouzin.
Faut-il se fier aux révélations de Michel Fourniret ?
Avant même de perdre la mémoire, le tueur en série aimait se jouer des familles des victimes, “Il faut le surveiller et aller extrêmement vite : le temps est compté”, analyse le psychologue Jean-Luc Ployé. Celui qui n’a aujourd’hui “plus rien à perdre” a confié avoir enterré le corps d’Estelle sur son ancienne propriété. Si ces informations difficilement recueillies par la juge d’instruction Sabine Khéris sont à prendre avec des pincettes, elles restent le seul espoir de la famille de la victime, “Qu’il manipule ou pas, il faut vérifier” explique Maître Corinne Herrmann, avocate du père d’Estelle Mouzin. Pour l’instant, aucune trace de la jeune fille n’a été trouvée alors que de nouvelles fouilles ont commencé dans le bois du château du Sautou (Ardennes) le lundi 7 décembre. Pour Jean Luc Ployé, “C’est lui qui a encore toutes les clés. Il restera le maître du temps jusqu’à sa mort.”
Annabelle ROCHET