iPhone, iPad, iPod, autant de noms si ancrés dans notre quotidien que nous n’y prêtons même plus attention. Plus le temps passe, plus la iLife – le mode de vie selon Apple – fait des adeptes… et des détracteurs. Exacerbant les passions, tout le monde y va de son petit avis sur la Pomme. Retour sur les rouages d’une société définitivement pas comme les autres.
5 octobre 2011 : le monde des technophiles est en émoi. Steve Jobs, iconique fondateur de la société Apple, succombe des suites d’un cancer du pancréas à l’âge de 56 ans. Tout autour du globe, des anonymes se bousculent autour des Apple Store pour rendre un dernier hommage à l’inventeur du Macintosh. Dans une atmosphère quasi religieuse, on dépose des trognons de pommes devant les enseignes de la marque de la même manière qu’un croyant irait allumer un cierge à l’église. Symbole fort d’une société au capitalisme excacerbé où les nouveaux dieux se trouvent à la tête de multinationales gargantuesques, la scène prêterait presque à sourire – ou à pleurer, c’est selon. Surhomme visionnaire pour les uns, manipulateur narcissique et arrogant pour les autres, un peu des deux pour beaucoup, l’homme laisse derrière lui un véritable empire. Et une légende. Imaginez : 35 ans après sa fondation, la société à la pomme croquée est devenue l’une des entreprises à la capitalisation boursière la plus importante du monde. Fort des succès sans précédents de l’iPod, de l’iPhone, et de l’iPad, Apple a pendant longtemps réussi le tour de force d’avoir toujours un coup d’avance sur ses concurrents en créant non pas de nouveaux produits, mais de nouveaux standards. Mais à quel prix ?
Think different
Dans la galaxie Apple, il est courant de payer un ordinateur presque trois fois plus cher qu’un PC normal pour des performances brutes équivalentes. Et ça marche. Pour Louis Guitterez, vendeur au Club Iphone de Metz, cet état de fait s’explique par le marketing agressif et bien rôdé de la marque. ‘Apple a acquis une notoriété sans précédent, avance t-il. Je vois des gens de tout âge et issus de toutes les catégories sociales pousser la porte du magasin. C’est assez fou.’ Car ce n’est pas un produit que vous achetez chez Apple, mais un style de vie. Le slogan phare de la marque, martelé jusqu’à l’écœurement, pensez différemment, va dans ce sens. En achetant Apple, le consommateur a l’illusion d’appartenir à une caste, à un groupe aux usages codifiés, à une catégorie éclairante et éclairée. Acheter Apple, c’est presque un acte de foi. Et quand on aime, on ne compte pas. Ça, Steve Jobs l’avait bien compris. Chaque dernier né de la marque est présenté comme une révolution. Et tant pis si l’iPad n’est pas capable de supporter un script aussi courant que le flash. Tant pis si vous ne pourrez jamais ouvrir votre iPhone. En ayant mis en place un écosystème verrouillé de bout en bout et en ayant réussi à faire croire au consommateur que c’était pour son bien, Apple s’assure le contrôle de ses produits et la fidélité de ceux qui les achètent. À croire qu’à vouloir tous penser différemment, on finit par ne plus penser du tout.
Le ver dans la pomme
Il serait cependant de mauvaise foi de nier la qualité intrinsèque des produits estampillés Apple. La question n’est pas là. Steve Jobs a réussi à faire ce qu’aucun autre PDG n’avait réussi à faire avant lui : faire de ses consommateurs des adeptes. Et tant pis pour l’éthique, car au royaume de la pomme la fin justifie toujours les moyens. Des scandales concernant les conditions de fabrications de ses produits en passant par la gestion de ses employés frisant l’exploitation, la firme de Cupertino ne recule devant rien pour asseoir toujours un peu plus sa position dominante sur le marché des nouvelles technologies. Alors que Google fait le pari des lunettes connectées pour révolutionner ( encore ) notre quotidien, il se murmure qu’Apple concentrerait ses efforts sur une montre de nouvelle génération.
Ayant érigé le goût du secret en caractéristique phare de sa communication, nous n’en savons à l’heure actuelle pas beaucoup plus sur le futur catalogue de la marque. Gageons qu’il s’agira d’un succès qui apportera dans son sillage son lot de nouveaux questionnements quant à l’envie de la firme de s’implanter toujours un peu plus dans notre quotidien. En définitive, Apple est une société à l’image de son fondateur : fascinante, paradoxale… et impitoyable.