Webullition était toute la semaine du 28 au 31 mars 2023 aux Assises internationales du journalisme de Tours. A cette occasion, Romain Colas, rédacteur en chef adjoint de La Correspondance de la presse, présentait cinq journalistes venus parler des médias qu’ils ont créés cette année.
Gilles Vanderpooten, Axel Roux, Gilles Tanguy, Mathilde Boudon-Lamraoui et Ulysse Mathieu ont tous un point commun : ils ont créé leur média cette année. La liberté de pouvoir gérer son propre média et d’avoir le total contrôle de la ligne éditoriale plaît de plus en plus aux journalistes. Rencontre avec ces créateurs ambitieux.
Gilles Vanderpooten – Reporters d’espoirs et journalisme de solutions
Média d’action exerçant du journalisme de solutions, la revue Reporters d’espoirs donne envie d’agir. Mais qu’est-ce que le journalisme de solutions ? Un terme évoqué de nombreuses fois dans les médias, mais rarement compris du grand public.
Par définition, le journalisme de solutions est une approche de la pratique des médias qui se concentre sur les réponses aux problèmes sociaux. Le journalisme de solutions consiste à présenter des solutions à ces problèmes, à voir comment et pourquoi les réponses fonctionnent ou ne fonctionnent pas.
« Nous sommes là en tant que journaliste pour refléter la complexité des choses, parler des dysfonctionnements, des problèmes, des solutions, des pistes de résolution de problème. » explique Gilles Vanerpooten. La volonté du directeur général de Reporters d’espoirs est de pointer un manque médiatique : « Cette démarche est devenue majoritaire aujourd’hui, elle reste homéopathique mais tous les médias s’en emparent ». Plus qu’une idéologie, le journalisme de solutions est une méthode.
« Il y avait comme un manque dans le paysage médiatique. Au lieu de réaliser un média numérique, on s’est concentré sur la création d’un magazine semestriel. Sur l’aspect marketing et commercial, on a encore beaucoup à faire et à apprendre, mais l’envie ne manque pas. » relate le directeur général de Reporters d’espoirs.
Ulysse Mathieu et Mathilde Boudon-Lamraoui – Contre-Jour : Journalisme et éducation populaire
Revue née de la volonté de faire résonner des récits, la revue Contre-Jour a été fondée par le collectif La Friche, représentée par les journalistes Ulysse Mathieu et Mathilde Boudon-Lamraoui. Le collectif d’une vingtaine de journalistes réalisent de l’éducation au média, des résidences, des ateliers auprès des zones rurales, des écoles, et parfois même des prisons.
« Notre philosophie est d’utiliser les méthodes et les outils de l’éducation populaire. Dans ces endroits où on accompagne les personnes, on rencontre et on participe à créer des espaces de paroles très intéressants », relate Ulysse Mathieu.
« Nous sommes militants, mais lorsque je lis la revue, je n’ai pas l’impression de lire un objet militant. J’ai l’impression de lire un objet singulier, qui apporte un regard différent sur des choses qu’on aurait pu entendre de nombreuses fois », évoque Mathilde Boudon-Lamraoui.
Eux aussi ont choisi de créer leur média sous la forme d’une revue. Les journalistes évoquent l’idée de rassembler, de mettre en écho, d’avoir un début, un milieu et une fin. On y trouve de nombreuses photos, des gravures, de l’illustration : « C’est aussi la dimension de laisser une trace ».
« On a envie de trouver un écho et de faire raisonner toutes les paroles qu’on entend et qu’on reçoit en atelier. »
Ulysse Mathieu et Mathilde Boudon-Lamraoui
Axel Roux – Vakita : le média enquête créé par Hugo Clément
Rédacteur en chef de Vakita, Axel Roux est venu présenter ce nouveau média engagé. Vakita, nom venant de ce marsouin vivant dans le golf du Mexique et mammifère marin le plus menacé au monde.
Créé et pensé par le journaliste engagé et militant Hugo Clément, Vakita propose principalement des enquêtes sur l’environnement et sur l’agro-industrie. « Nous sommes très engagés en faveur de l’environnement, mais nous couvrons également des faits de sociétés ou des infos brûlantes comme la réforme des retraites. A travers des mobilisations, on essaye de donner des pistes d’action pour essayer de faire bouger les lignes », explique Axel Roux.
Composé d’une quinzaine de personnes dont huit journalistes, Vakita suscite déjà un grand intérêt public. Le rédacteur en chef explique la volonté de réaliser des enquêtes approfondies, « quitte à passer des mois dessus, pour avoir le contenu le plus précis possible ».
« Créer son média, c’est la liberté de pouvoir maitriser de nombreuses choses soi-même en accordant plus de temps et de patience. »
Axel Roux
Gilles Tanguy – L’Informé et investigation économique
Président du média d’investigation économique libre et factuel L’Informé, Gilles Tanguy explique son souhait d’avoir voulu tourner une page dans sa carrière journalistique, en créant un nouveau média économique, libre et sans pub.
Aidé par l’entrepreneur Xavier Aignel et composé d’une équipe de 16 journalistes, le média vieux de quatre mois revendique une liberté éditoriale absolue.
« On est très satisfaits pour le moment. La plus-value de notre média est l’investigation et l’enquête. Aujourd’hui, quand on lis un journal, 90% de ce que l’on voit, on l’a déjà vu. Notre pari à nous est de réaliser des articles et des angles qui n’ont jamais été traités avant, ou très peu » relate Gilles Tanguy.
« C’était l’occasion de se mettre à son compte, de lancer quelque chose, de choisir les gens avec qui on travaille »
Gilles Tanguy
Photos : Antonin UTZ