Dans le sillon du Front National, d’autres mouvements d’extrême droite tentent d’exister face à l’omniprésence de Marine Le Pen sur la scène médiatique.
Carl Lang est candidat en 2012 à l’élection présidentielle à la tête de l’Union de la Droite Nationale (qui rallie le Mouvement National Républicain, Nouvelle Droite Populaire, et le Parti de la France).
Bloc Identitaire est un mouvement connu pour ses actions polémiques, à l’exemple de l’opération « apéro saucisson & pinard contre l’islamisation ». Fabrice Robert en est le président.
Carl Lang et Fabrice Robert dénoncent tous deux le monopole du Front National.
En quoi votre mouvement diffère-t-il du Front National ?
Carl Lang :
Premièrement, nous divergeons par rapport à l’Europe. La sortie de la zone euro aurait des répercussions terribles sur le plan économique et social. Même si nous n’étions pas pour la monnaie unique à l’origine, nous pensons que descendre du train serait un contre-sens calamiteux.
Selon moi, Marine Le Pen cherche à être populaire, on ne peut pas raconter n’importe quoi aux Français, je préfère dire une vérité qui dérange. Deuxièmement, Marine Le Pen prône une politique étatiste. Sa politique économique est très à gauche. L’UDN favorise en revanche l’initiative privée et préconise une non-intervention de l’Etat. Troisièmement, je suis en désaccord profond avec elle sur le sens qu’elle donne à la laïcité et la citoyenneté. A mon sens, une République laïque ne suffit pas à faire obstacle à l’islamisation de la société.
Fabrice Robert :
D’une part, Marine Le Pen est hostile aux régions et à l’Europe. Elle ne défend que l’identité nationale. Bloc Identitaire en revanche prône une identité locale, nationale, et européenne. Elles sont indissociables. D’autre part, Marine Le Pen mène un combat électoraliste et joue sur sa médiatisation. Selon nous, le pouvoir ne se prend pas par les urnes, il faut d’abord conquérir les esprits. Ainsi, nous menons directement des actions de terrain, nous développons des projets associatifs : le but est de faire avancer nos idées. En cela, les élections ne sont pas pour nous un moyen, mais un outil pour se faire connaître, aller à la rencontre des maires et faire adhérer à nos idées. Nous sommes des gens de terrain, nos actions ont lieu dans la rue.
Dans quelle mesure vos idées se rapprochent-elles du Front National ?
Carl Lang :
Marine Le Pen et moi-même nous accordons sur deux points. Le premier concerne notre ligne nationale : nous sommes hostiles au laxisme dans les politiques d’immigration, bien que je trouve que ses positions manquent de fermeté. Si je suis élu président, l’immigration stoppera de manière immédiate, et je favoriserai le retour au pays pour les étrangers qui vivent en France. Il faut inverser le courant migratoire, sans quoi l’identité française est mise en péril. Le deuxième point de convergence concerne la Russie. Comme Marine Le Pen, je recommande un partenariat privilégié avec la Russie. Notre voisin est un grand pays, des échanges privilégiés sont dans l’intérêt de la France.
Fabrice Robert :
Les médias nous classent comme étant d’extrême droite mais je ne m’identifie pas comme tel, et n’aime pas y être associé. Nous sommes simplement des identitaires. Nos thématiques dépassent les clivages politiques gauche-droite. En revanche, je pense que Bloc Identitaire est un laboratoire d’idées. Nous imposons des thématiques, et celles-ci sont souvent reprises par Marine Le Pen, ou encore par des personnalités qui encouragent nos démarches, telles que Claude Guéant ou Eric Zemmour. Par exemple, l’islamisation de la France ou encore le racisme anti-blanc sont des préoccupations que nous avons en commun. Pour résumer, nous partageons des ambitions, mais divergeons dans nos approches.
Selon vous, Marine Le Pen a-t-elle le monopole du discours national ?
Carl Lang :
Il est clair que Marine Le Pen dispose du monopole médiatique. Par exemple, lors de la question de la succession à Jean-Marie Le Pen, des concessions ont été largement faites à sa fille, au détriment de Bruno Gollnisch, pourtant l’un des favoris. Selon moi, elle est surmédiatisée, je compte d’ailleurs écrire une lettre au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) pour le dénoncer.
Fabrice Robert :
Quand on parle de lutte contre l’immigration ou de défense de l’identité nationale, le grand public pense immédiatement à Marine Le Pen. La candidate du Front National est dans une démarche électoraliste et cherche à faire une campagne très médiatique. Mais il y a une vie après l’élection. Conquérir les esprits est une démarche sur le long terme, le pouvoir se prend aussi sur le terrain, et c’est ce que nous nous efforçons de faire.