Fanicos
Réalisé par Aurélie Bazzara et Arnaud Houllé
La rivière du Banco est considérée comme la zone la plus criminogène d’Abidjan, capitale économique de la Côte d’Ivoire. Mais elle est aussi un pressing à ciel ouvert.
Rythmée par les bruits du lessivage des vêtements, ceux de l’autoroute mêlés aux chants d’encouragements, la rivière du Banco est un cocon cosmopolite où se côtoient des immigrés maliens, burkinabés, nigérien et guinéens. Tous sont blanchisseurs de linge, une profession ancestrale nommée Fanicos en langue locale Malinké. De père en fils, par apprentissage ou pour fuir les zones de tensions, ils viennent d’horizons différents mais ils ont un but analogue : gagner un maximum d’argent pour retourner dans leur pays d’origine auprès de leur famille. Voir les abords du Banco au pied du quartier populaire d’Attékoubé, c’est se laisser teinter par ce mélange éclectique qui peuple quotidiennement le « labo », surnom donné à la rivière par les Abidjanais.
Habitée par près de deux millions d’habitants, Abidjan est nourrie par le brassage ethnique et culturel. Berceau d’une crise politico-militaire meurtrière, la capitale adopte aujourd’hui une pléthore de mesures pour tourner définitivement la page de l’ingérence et se moderniser. De l’adoption du Plan national de développement aux travaux d’infrastructures en passant par la lutte contre la pauvreté et l’éducation pour tous, le triomphe de l’éléphant semble en marche. L’objectif : atteindre l’émergence d’ici 2020. Mais les plans nationaux ne règlent pas tout. Abidjan est tiraillée entre deux époques : celle des coutumes traditionnelles de la « période Felix Houphouet-Boigny » et celle de la modernité occidentale. Si d’un côté le gouvernement donne un cap optimiste vers le renouvellement, les moyens humains et financiers manquent considérablement. La corruption et les défaillances continuent de gangrener les instances gouvernantes. Les Fanicos sont l’exemple même de cette partie de la population oubliée des plans de développement et qui pâtit des incohérences gouvernementales.