La conférence « Est-on libre de dessiner ce que l’on veut et rire de tout ? » s’est tenue à Thionville ce vendredi 17 mars à l’occasion de la première journée du festival Politéïa. Dans l’enceinte du Casino, Agathe André, journaliste et ex-présidente de l’association Dessinez Créez Liberté, Juin, dessinateur de presse à Charlie Hebdo et Guy Konopnicki, journaliste – écrivain rappellent ce qu’est la liberté d’expression et alertent au sujet de la censure croissante des dessins de presse.
Les dessinateurs de presse subissent des contraintes et pressions grandissantes concernant les caricatures qu’ils publient dans les journaux. Agathe André, Juin et Guy Konopnicki étaient conviés à une rencontre animée par Alexis Weigel pour s’exprimer à ce sujet.
Les caricatures de plus en plus critiquées
Les invités constatent unanimement que les satires publiées dans les journaux sont de plus en plus visées par des critiques et des appels au boycott. « On a beaucoup fait reculer la censure. C’est l’œuvre de journaux post-68 notamment. Et certaines personnes souhaitent la ramener », affirme Guy Konopnicki. Ce constat conduit à se demander si la société française ne connaîtrait pas à une redéfinition des contours du rire. L’évolution des mœurs occasionne aussi une évolution de l’humour. Juin revient sur la caricature publiée dans Charlie Hebdo à la suite du séisme survenu en Turquie et en Syrie qui avait suscité une grande polémique. « Les bons dessins choquent et c’est fait pour », rappelle Guy Konopnicki. « Quand un dessin dérange, il faut se demander pourquoi », complète Agathe André. L’idée d’accompagner les caricatures d’un dessin explicatif est parfois soulevée mais fait débat. « Au départ le dessin est une information sans paroles, un art populaire compris de tous », explique Juin. Faire de la pédagogie autour d’un dessin risque donc de le dénaturer.
L’association « Dessinez Créer Liberté »
L’association « Dessinez Créez Liberté » est créée par SOS racisme et Charlie Hebdo au lendemain des attentats survenus dans leurs locaux. Elle cherche à donner les clefs pour décrypter l’humour du dessin. Au travers des rencontres avec des personnes de tous âges et issues de tous milieux, l’association revient sur ce qu’est l’humour et redonne les codes pour comprendre ce langage. Il y a différentes formes de dessins : l’illustration, le reportage dessiné, le croquis d’audience et la satire. C’est elle qui conduit le plus généralement à des polémiques. « Les gens ne sont pas à l’aise pour manipuler le dessin. C’est plus facile de s’attaquer à la représentation de la violence qu’à la violence elle-même. Pourtant, elle la précède toujours », indique Juin. « La seule limite dans tout ça, c’est le racisme », conclue Guy Konopnicki.