A l’occasion de la 30ème édition du Festival International de la Géographie (FIG), la librairie du Temple Neuf de Saint-Dié-Des-Vosges accueille les dessins de Plantu. Avec un thème : l’immigration.
Les yeux rivés sur les murs décorés, nous gravissons les marches de la petite librairie du Temple Neuf. Des guirlandes d’illustrations, sobrement fixées par des pinces à linge en bois, nous introduisent petit à petit dans l’univers de Plantu, l’intemporel dessinateur du Monde. De 1973 à juillet 2019, cent dessins tout juste, savamment choisis par le collectionneur Rémy Pézerat, décrivent l’histoire des débats sur l’immigration en France et en Europe.
Caricature et Histoire
De l’arrivée massive de travailleurs étrangers à l’enfant syrien retrouvé sur la plage, en passant par la chute du Mur de Berlin et la succession de lois bravant le droit universel. Plantu a traversé plusieurs époques de bouleversements, toutes marquées de cette question de la différence. L’évolution est nette depuis les premières illustrations, celles des années 70, lesquelles paraissent venir d’un autre temps. Les migrants sont à l’image de l’époque, extrêmement typés, mais les discours eux, sont les mêmes. Dès l’arrivée de l’immigration algérienne, l’opinion ressent une véritable marée.
Un discours cinquantenaire
La peur de l’autre, retranscrite par des dessins simples et légèrement métaphoriques. Mais sans jamais tomber dans la polémique – avec Plantu, ce n’est pas le propos. On y voit tout de même une critique franche des partis extrémistes de droite, une raillerie imagée de l’hypocrisie européenne, le tout pétri de références justement choisies, piochées dans l’art et dans l’histoire. Quelques touches de douceur, d’humour, n’existent que sur fond d’engagement plus ou moins acharné pour le droit proclamé des Hommes à circuler et à trouver asile. « C’est excellent, on a du premier, du deuxième, du troisième degré. On peut en rire à défaut d’en pleurer, songe Alain, un visiteur. Ça pique, ça gratte. Ça chatouille rarement, mais en tout ça fait réagir ». Pour Rémy Pézerat, constance « humaniste » et gentillesse sont les traits marquant d’un homme qu’il a eu la chance de pouvoir rencontrer.
Présentation ficelée
L’histoire de Plantu, c’est une partie de son histoire à lui. Il a découvert le dessinateur sur les bancs de la faculté de droit, dans un premier contact avec Le Monde. Depuis lors, il est passionné. Derrière les œuvres, sa rencontre avec l’homme l’a d’autant plus inspiré : « C’est un gentil […] ». Ému aux larmes par le regard de sa fille de l’autre côté de la salle, il poursuit : « Je ne sais pas si je le suis aussi, mais lui en tout cas, c’est un gentil ». Alors qu’ils n’ont pas eu de contact depuis plusieurs années, le dessinateur rappelle le docteur en science politique avant le festival et lui a demandé de faire simple. Des feuilles A4, plastifiées et pendues par des pinces à linge sur des ficelles longeant les murs. Une approche dépouillée. Résolument journalistique.