Un documentaire revenant sur le viol d’une Indienne de 23 ans par six hommes dans un mini-bus vient d’être interdit par la justice indienne.
Rappelez-vous, le 16 décembre 2012, une Indienne de 23 ans se faisait violée par six hommes dans un mini-bus alors qu’elle revenait du cinéma. D’une brutalité inhumaine, cet acte avait entraîné sa mort quelques jours plus tard. Il ne restait que 5% d’intestins dans son corps. Révoltée, indignée, l’Inde s’était mobilisée. Ces rassemblements inédits ont ensuite poussé le gouvernement à adopter des lois plus sévères à l’égard des violeurs. L’Inde tout entière éprouvait le besoin de parler, de dire non à ce fléau. Mais aujourd’hui, un documentaire revenant sur les faits vient d’être interdit par la justice indienne.
Les auteurs du viol n’ont pas de remords. Mukesh Singh en particulier. Le chauffeur du mini-bus, impliqué dans le viol de l’étudiante et interviewé pour le documentaire India’s Daughter, ne mâche pas ses mots. « Une fille respectable ne doit pas traîner dans les rues à 21 heures. Les filles sont bien plus responsables des viols que les garçons. » Un homme respectable se doit donc de leur donner une leçon, de les punir. Et Mukesh Singh est un homme respectable… Un homme surtout irresponsable, qui n’assume pas ses actes. Selon lui, seulement 20% des femmes méritent le respect. Des arguments machistes pour justifier son comportement. Des arguments typiques de l’homme qui se voit supérieur à la femme. Pour ne pas faire dans la demi-mesure, Mukesh Singh a déclaré devant la caméra que les filles qui se font violer ne devraient pas se défendre. Face à ces propos, la justice indienne a décidé mardi soir d’interdire la diffusion du documentaire dans le pays.
Trouble à l’ordre public ?
Le ministre de l’intérieur, Rajnath Singh, a expliqué que le gouvernement condamnait India’s Daughter. Le film offrirait à Mukesh Singh une plateforme pour exprimer et transmettre ses idées. Le viol étant un problème national en Inde, le gouvernement ne souhaite pas qu’un individu en fasse l’éloge, que ses dires aient un rayonnement national alors que ce type d’agression cherche à être enrayé.
Autre souci : le pays reste très marqué par l’horreur de 2012. Toutes les 22 minutes, une femme est violée et une sur trois a moins de 18 ans. Le gouvernement pense que le documentaire est susceptible de provoquer une atteinte à l’ordre public et de susciter la colère de la population.
Choquée par l’interdiction nationale, la réalisatrice britannique Leslee Udwin raconte avoir eu l’autorisation du ministère de l’Intérieur pour filmer et interviewer Mukesh Singh. A ses yeux, cette soudaine opposition n’aura pas l’effet escompté : « Plus ils essaieront d’empêcher le film, plus l’intérêt des gens sera vif. Maintenant, tout le monde va vouloir le voir « . En Inde et ailleurs.