Dans « Possessions », Eric Guirado revisite la tragédie du Grand Bornand, où un couple de « gentils beaufs » inoffensif à l’origine décime une famille de sang-froid.
Qui ne se souvient pas de « l’affaire Flactif »? Ce fait divers macabre où un riche promoteur immobilier, sa femme et leurs trois enfants avaient été assassinés au Grand-Bornand en 2003. Le dernier film d’Eric Guirado, « Possessions » s’inspire de cette tragédie où un homme au départ simple, se transforme en monstre.
Marilyne (Julie Depardieu) et Bruno Caron (Jérémie Rénier), désireux d’améliorer leur vie, déménagent du Nord vers un petit village de montagne avec leur fille. Ils rencontrent alors leur promoteur, Patrick Castang (Lucien Jean-Baptiste) et sa femme Gladys (jouée par Alexandra Lamy).
Castang leur annonce que leur chalet est encore en travaux, il les loge alors provisoirement dans un chalet haut standing. La famille exulte d’abord devant tant de luxe. Ils trouvent tous deux rapidement du travail, Bruno comme mécano, Maryline en tant que femme de ménage chez les Castang. Puis, s’enchaînent les déconvenues: après avoir été replacés dans ce chalet luxueux, les Castang les installent dans un appartement plus petit, en attendant que leur chalet soit finalement construit.
Le couple se sent dévalué et commence à déchanter. L’atmosphère entre les deux familles devient pesante, le malaise s’installe. De « gentils beaufs moyens » à locataires haineux, on assiste à la transformation inhumaine des Caron. Le manque de considération de la part des Castang, le sentiment d’amertume, de frustration,et de jalousie les poussent dans un engrenage qui tourne à l’obsession, jusqu’au drame.
Convoitise
Le thriller d’Eric Guirado aborde les thèmes de la convoitise et ausculte les travers de notre société contemporaine où apparence et possession jouent souvent un trop grand rôle. Guirado montre la noirceur du fait divers plus qu’il ne juge. Si le malaise est bien installé, le film pâtit cependant de quelques longueurs.
Jérémie Rénier, qui a pris dix-huit kilos pour le film, est impressionnant en beauf rustre.Aigrie et complexée par un sentiment d’infériorité, Julie Depardieu est saisissante. Inquiétante, elle ira jusqu’à pousser son mari au crime. Alexandra Lamy et Lucien Jean-Baptiste livrent une prestation juste: celle d’un couple décomplexé et heureux, qui ne pressent rien du malaise qui s’installe. Pas toujours très fin, le film établit certains raccourcis trop clichés d’une famille de Ch’tis fan de tuning, dans laquelle le patriarche se vautre dans le canapé, ceinture ouverte et pantalon déboutonné, devant un hamburger et un soda. Mais au final, on reste sidéré devant la puissance du récit, ou ce besoin de posséder toujours plus finit par devenir mortel.
Bande annonce:
Possessions – Bande-Annonce [VF|HD] par Lyricis
Audrey Parfait