Produire, vendre, consommer. Cette croissance infinie, moteur de notre modèle économique actuel, semble démontrer ses limites. L’état de la planète se détériore de façon alarmante. Néanmoins, un parti propose de remettre en cause ce système afin d’enrayer la crise écologique : celui de la décroissance. Une solution envisageable ou simple utopie ? Pour éclaircir le sujet, nous avons échangé avec Thérèse Delfel, membre du parti.
Depuis 40 ans, notre économie se développe sur une croissance perpétuelle et infinie, ce qui a de fortes répercussions sur l’environnement. Fonte des glaces, acidification des océans, pollution de l’air, destruction des écosystèmes. Les problèmes écologiques se multiplient et l’état de la planète se dégrade à vue d’oeil.
Le nouveau rapport publié en 2018 par le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) est sans appel : il devient urgent d’agir. La décroissance, un concept politique et social qui s’est fortement développé depuis les années 70, souhaite rompre avec le modèle économique actuel. Une solution parmi tant d’autres, pour endiguer cette crise écologique sans précédent dont souffre la planète.
“Avec les défis environnementaux actuels, il est urgent de ralentir la cadence”
Ces problèmes écologiques ne datent pas d’hier. En effet, dès les années soixante-dix, de nombreux chercheurs ont commencé à mettre en garde notre société des dangers de la surconsommation. Notamment sur l’état de la planète. En 1972, le Club de Rome publie son célèbre rapport intitulé « Limits to Growth » (Halte à la croissance). Dedans, ils y affirment que le système actuel va s’effondrer si la croissance industrielle ne se stoppe pas rapidement. Ils soulèvent également la problématique suivante : comment assurer une croissance continue dans un monde aux ressources restreintes ?
Lorsque la production s’accélère, la pollution augmente et les ressources naturelles (pétrole, gaz, charbon, eau) s’épuisent. Des ressources qui ne sont pas illimitées, alors que la population mondiale quant à elle ne cesse de croître. Autant de problématiques, que les partisans de la décroissance souhaitent résoudre. “C’est une évidence que la décroissance est une solution. Posséder toujours plus pour produire et vendre toujours plus, ce n’est pas un modèle viable sur le long terme.” souligne Thérèse Delfel.
Cette surconsommation, souvent associée au bonheur, démontre aujourd’hui ses limites. “Avec les défis environnementaux actuels, il est urgent de ralentir la cadence […] Il est également important de ne pas prendre part à cette société industrielle et consumériste”. Parmi les solutions proposées par le parti, on retrouve par exemple la réduction du temps de travail, le partage de l’emploi, le développement d’une économie circulaire, la production de biens durables, la réduction des déchets, ou encore la lutte contre l’obsolescence programmée.
“Le problème majeur de notre société actuelle, c’est l’appât du gain.”
Les partisans de la décroissance souhaitent une société où chaque être humain possède les droits fondamentaux, tel qu’un air sain, un toit et de la nourriture. Ce qui n’est toujours pas le cas encore à l’heure actuelle. Des inégalités jugées “indécentes” par Thérèse Delfel, membre du parti de la décroissance. « Pour gommer ces inégalités, il faut que chacun revoie sa façon de consommer ». En effet, pour envisager une baisse de la production, il convient d’abord de diminuer la consommation. L’éternel cycle de l’offre et la demande. Un pouvoir qui, « repose entre les mains de chaque citoyen” comme le rappelle Thérèse.
Pour qu’un mode de vie tourné vers la décroissance soit durable et bénéfique à la planète, il commence par “une certaine sobriété dans sa façon de vivre”. La membre du parti ajoute « ce n’est plus possible de voir qu’à l’heure actuelle, certains foyers cumulent cinq voitures. Le problème majeur de notre société actuelle, c’est l’appât du gain […] L’être humain entasse les biens matériels. Cela ne garantit ni l’avenir, ni la santé, ni la société.” La solution envisagée par la décroissance, c’est de baser son modèle économique sur des principes de durabilité. “Il est tout à fait possible de se nourrir, s’habiller et se déplacer sans détruire” déclare Thérèse Delfel.
“Il faut se retrousser les manches et mettre ses actes quotidiens en cohérence avec notre parole.”
Pour les partisans de la décroissance, il est important de “remettre l’homme et la nature au centre des préoccupations.” Ce n’est plus un fait isolé : les choix que nous faisons ont un réel impact sur notre société et la planète. Pour faire face aux défis environnementaux, il apparaît donc comme primordial pour Thérèse Delfel que chaque citoyen soit « en accord avec soi-même » et « prenne le temps de ralentir son mode de vie ». La première étape passe par une remise en question sur sa façon de consommer. « Demain matin on peut tout résoudre en arrêtant d’acheter massivement. Il ne faut plus jeter mais donner, échanger et remplacer. Cessons de participer à un quelconque projet de destruction.«
Replanter massivement des arbres semble également être une idée contre la crise écologique. L’une des ambitions des partisans de la décroissance, c’est de « transformer tous les espaces encore vivants en prairies naturelles, vergers, forêts et écosystèmes. » Une certaine solidarité et un respect de la planète, qui sont des valeurs fortement revendiquées par le parti. “Soyons créatifs et uniques dans nos modes de vie […] il faut se retrousser les manches et mettre ses actes quotidiens en cohérence avec notre parole”. En ce qui concerne l’avenir de la planète, la partisane de la décroissance en est certaine “il n’y a rien de perdu, la situation est encore réversible.”
Avec des chiffres records lors des précédentes élections Européennes, la thématique de la décroissance semble ainsi susciter de plus en plus l’intérêt des citoyens. Un objectif accompli pour les partisans du parti, qui ont pour ambition d’amener le sujet au sein du débat public. “À présent, personne n’ignore que le réchauffement climatique est là et bien réel. Nous sommes 7 milliards sur la planète. Il est évident que si chacun y met du sien, nous pouvons changer les choses.”