L’Assemblée nationale serait proche d’être dissolue, à en croire les révélations du JDD, ce dimanche. Le chef de l’État commencerait à installer dans les esprits l’inéluctabilité d’un nouveau scrutin législatif. Au parti présidentiel, tout est déjà prêt pour une nouvelle campagne en cas de dissolution.
C’est une menace qui plane désormais depuis plusieurs mois. Aujourd’hui, il n’est plus vraiment question de savoir si cela arrivera, mais plutôt quand cette annonce sera prononcée par Emmanuel Macron. Ce dimanche, Stéphane Séjourné, secrétaire général de Renaissance à indiquer auprès du Journal du Dimanche que tout est en place pour parer au renouvellement des députés, du « protocole de dissolution » au « rétroplanning détaillé » sur le programme des jours suivant cette dissolution.
Qu’est ce qu’une dissolution de l’AN ?
Le pouvoir du président de la République lui donne la possibilité de procéder à une dissolution parlementaire. Cela consiste à mettre, de manière prématurée, à la fin du mandat de l’Assemblée nationale, et de ses députés. Situation rare, elle est le dernier recours en cas d’événement extrême, comme peuvent l’être les crises. Cette dissolution peut également être enclenchée lorsque le président en place ne dispose pas d’une majorité stable au sein de cette assemblée. Elle peut être perçue comme l’échappatoire indispensable dans le cas où la politique du pays serait bloquée, ou que l’on assisterait à une paralysie institutionnelle, avec un niveau de dissensus tel que la gouvernance du pays devient impossible.
De fait, lorsque l’opposition est trop puissante dans l’hémicycle et que le camp présidentiel ne parvient pas à former des alliances pour faire voter les lois prévues dans son programme, le pays peut s’enliser dans l’immobilisme, ou pire encore. En provoquant de nouvelles élections législatives, la dissolution permet de solliciter les électeurs pour qu’ils désignent une autre majorité, entendu une qui soutiendra son action. Certains critères sont, à l’heure actuelle, réunis. D’autant plus que les débats au sein de l’hémicycle deviennent, au fil des semaines, de plus en plus ardus. À tel point que la haine commence à apparaître.
Un hémicycle sous tension
« Qu’ils retournent en Afrique ! ». Les propos de Grégoire de Fournas, député du Rassemblement National, illustre assez parfaitement les points de dissension entre les différents partis présent au sein de l’AN, ne parvenant plus à communiquer, les uns avec les autres. Jeudi dernier, alors que le député LFI, Carlos Martens Bilongo interpellait l’exécutif sur sa politique migratoire, monsieur De Fournas s’est illustré par cette intervention, ayant fait le tour de la toile, et relayée par l’ensemble des médias. Les propos de l’élu RN, considérés comme étant racistes par une grande majorité de la classe politique, ont provoqué un véritable tollé. Tandis que Jean-Luc Mélenchon désire que le politique d’origine bordelaise soit banni de l’AN, Marine Le Pen tente de calmer le jeu, évoquant une simple maladresse du député.
Le bureau de l’AN, qui s’est réuni ce vendredi afin de voter les sanctions réprimandant cet acte, a décidé d’omettre au représentant du parti d’extrême droite la sanction la plus lourde existante : une exclusion de 15 jours de l’hémicycle, ainsi qu’une indemnité parlementaire divisée par deux, durant deux mois. Symbolique, certes, mais cet événement ne risque que d’aggraver la fracture qu’il existe déjà entre les divers groupes politiques.
Dissolution de l’AN, raisons et objectifs
Les premiers mois de second quinquennat d’Emmanuel Macron ont été marqués par la cacophonie de l’Assemblée nationale. La majorité présidentielle est parvenue sans trop de difficultés à un accord sur la loi pour le pouvoir d’achat, mais depuis, les échanges sont paralysés. À tel point qu’Élisabeth Borne a fait l’usage, à quatre reprises, du 49.3 pour voter le budget 2023 et les six motions de censure qui y ont répondu. La réforme des retraites et le projet de loi sur l’immigration annoncés pour début 2023 préparent encore des débats mouvementés dans l’hémicycle. Le risque pour Emmanuel Macron, élu sur la base d’un programme réformateur, est d’être contraint à l’immobilisme faute de majorité absolue à l’Assemblée.
Dissoudre cette dernière serait donc une occasion en or pour le président de regagner une majorité absolue au travers d’une nouvelle compagne. Une stratégie habile car si politiquement le camp présidentiel a beaucoup à gagner avec une dissolution, il pourrait aussi perdre toute crédibilité auprès des Français. En effet, il lui faudra être capable de donner une raison autre que des intérêts politiques propres pour justifier la dissolution qui convoquerait la tenue de nouvelles élections législatives.