Pour lieu de sa deuxième réunion de concertation, les représentants de l’Etat ont choisi Florange. La ville, qui risque d’être coupée en deux par un des tracés de l’A31bis, ne leur a pas fait bon accueil.
« Quelle mauvaise foi ! Ça ne m’étonne pas que ça vous ait pris 40 ans! », s’exaspère un Florangeois. Face au mur qu’incarnaient la Dréal (la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) et le sous-préfet de Thionville, les 200 habitants ont perdu patience. Les règles étaient pourtant annoncées : chacun devait prendre la parole pendant 3 minutes maximum. Mais il a parfois été difficile de les respecter. Cela n’a pas pour autant dévié la présentation bien rodée du projet.
Au cœur du problème : la mobilité. Saturée 10 h par jour, l’A31 reliant Nancy au Luxembourg est au centre des débats. Le flux de travailleurs frontaliers promet d’exploser à l’horizon 2030. Et les prévisions n’annoncent pas d’amélioration. L’Etat en est conscient puisqu’il prévoit 30 000 à 40 000 Français de plus qui viendront s’ajouter aux 100 000 qui traversent déjà la frontière quotidiennement. En plus de ces frontaliers, les Thionvillois empruntent l’A31 pour des trajets courts, ce qui entraîne des congestions dans toute l’agglomération.
Quatre tracés
Pour pallier le problème, la Dréal prévoit d’élargir le tronçon central de l’A31 sur deux fois trois voies, de Toul à Metz. Mais c’est au nord que ça coince. L’élargissement de la voie actuelle n’étant pas possible, un nouveau tracé est envisagé.
« Arrêtez de présenter les quatre projets, alors que nous savons très bien qu’uniquement deux d’entre eux sont étudiés sérieusement », assène Rémy Dick, maire de Florange. L’élu fait référence aux tracés F4 et F10 qui sont tous deux présentés comme « très attractifs » sur le site internet. Les représentants de l’Etat restent impassibles. Pour eux, tous les projets sont pris en compte.
« Le péage, c’est une double peine ! »
Autre sujet central des préoccupations des Florangeois : le péage. Le projet, s’il voit le jour à l’issue de la phase de concertation, sera une portion d’autoroute payante. Une solution qui est loin de ravir ses futurs usagers. Des applaudissements ironiques se font entendre. « Je m’oppose au péage car c’est une double peine. Nous payons déjà pour l’A31, nous n’allons pas payer deux fois », s’oppose Michel Decker, ancien maire de la commune. Pour la Dréal, ce fonctionnement est nécessaire. « Créer une section à péage nous permettrait de financer le projet directement, sans attendre les financements de l’Etat », assure Etienne Hilt, responsable du service transports.
A bas les poids-lourds
Sur l’A31, une part importante du trafic concerne les poids-lourds. Ces derniers sont en provenance ou à destination de l’Europe de l’Est. « Quand j’étais frontalière, une déviation avait forcé les poids-lourds à passer par l’A30 », témoigne Laurence Molé-Terver, aujourd’hui à la retraite. Pour elle, la solution serait tout simplement d’obliger le trafic international à emprunter une autre route. Brahim Hammouche, député de Florange, propose une autre solution : « Pourquoi ne pas utiliser l’or bleu, la Moselle, pour y transporter la marchandise. C’est le Rotterdam du Grand-Est ! »
Quant aux nuisances sonores et environnementales, la Dréal soutient, études d’impacts à l’appui, qu’il n’y en aura pas. Une réponse bien préparée qui laisse le public sceptique. « Florange dépasse déjà de 8% la moyenne nationale en pollution atmosphérique, rappelle l’association Paix à Florange. On veut éviter un surplus. » Malgré la fin de la réunion qui approche, chacun garde ses positions. Pour la salle, impossible d’accepter le projet en l’état. Pour l’Etat, cette autoroute est plus que nécessaire pour remédier aux problèmes de mobilité.
Laura Bannier et Anne Damiani