Internet offre une multiplicité de supports que la profession journalistique récupère au service d'une information devenue interactive.
A l’abordage ! La Presse, chavirée entre l’exode soutenu du lectorat et l’abandon massif des annonceurs, s'amarre maintenant sur le web pour se refaire une santé. Internet est un espace de travail infini où tous les supports peuvent coexister de manière pertinente. Pierre France, journaliste multimédia aux Dernières Nouvelles d’Alsace, décrit la profession de webjournaliste comme « le journalisme total ». L’interactivité avec l’internaute est l'un des facteurs du succès multimédia.
Le commentaire permet, dans un dialogue intelligent, d’affiner son propos, et le journaliste est invité à gérer autant que possible la communauté. Cette mission de modérateur peut représenter jusqu’à « un tiers du temps de travail nécessaire pour produire le papier original », explique Pierre France. Sur le web, la vie d'un papier ne se termine plus à la simple édition de l'article. Il continue d'exister tant que l'audience en débat.
Un nouveau public, critique, de moins en moins amateur de presse et jugeant la télévision peu crédible, arpente le web pour s’informer. Certains pure players comme Rue 89ou Mediapartl’interpellent depuis qu
elques années en se déclinant exclusivement sur la Toile. Pour les rédactions papier se dédoublant sur Internet, les désaccords sur la marche à suivre sont légion. Dans cette conquête de l’outil web, les simplifications technologiques sont une arme à double tranchant. L'ancien journaliste papier, malgré la facilité d'accès aux différentes techniques numériques, devrait uniquement sélectionner le support le plus pertinent. En pratique, le rédacteur, largué seul avec un panel de gadgets, devient « journaliste Shiva » en voulant cumuler à tout prix sons, vidéos et images. Pour Samuel Bollendorff, photographe réalisateur du webdocumentaire Voyage au bout du charbon, il faudrait au contraire croiser différentes compétencespour accéder à une écriture multimédia intelligente.
Les webreportages, orientés rich media, impliquent un nouveau défi pour la profession car leur réalisation demande du temps, ce qui est incompatible avec une économie tâtonnante liée pour l’instant au clic. Pierre France souligne l’importance de l’initiative individuelle pour imposer ces projets à valeur ajoutée.
Plutôt qu’une bête course à l’échalote, le journalisme sur Internet devrait être un vaste champ expérimental numérique au service d’une information de qualité.