Une lettre anonyme menaçant de mort le préfet de Corse, Patrick Strzoda, a été adressée à la préfecture le mercredi 17 janvier dernier. Au cœur de cette affaire : le déjà lourd dossier des paillotes.
On a l’impression que le problème des paillotes corses est insoluble. Dernier épisode en date : une décision administrative de décembre dernier par laquelle le préfet de Corse, Patrick Strozda, demande la démolition, avant le 15 janvier, de cinq paillotes situées sur la plage d’Argent, à Coti-Chiavari en Corse-du-Sud. Selon la préfecture, ces établissements bénéficieraient d’un emplacement exceptionnel sur le domaine public maritime en violation des règles d’urbanisme. Aujourd’hui, les paillotiers refusent de se plier à cet ultimatum et la tension est à son paroxysme après un courrier menaçant de mort le préfet de Corse. Un épisode pris très au sérieux alors que chacun garde en mémoire le précédent Erignac.
Les paillotes défendent leur cause
- Ces établissements offrent de nombreux emplois tout au long de l’année. En période de crise, c’est une véritable contribution à l’économie corse. En cas de fermeture, le coût social serait non négligeable. En outre, les paillotiers ont reçu le soutien de l’UMIH (Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie) et du comité régional des pêches de Corse. Les paillotes achètent de 40 à 60 % de la production des pêcheurs.
- Il y a des problèmes de droit, selon Stéphane Recchi, l’avocat du collectif de défense des établissements de plage. Certains établissements sont construits sur le domaine privé et les propriétaires contestent donc le bien fondé de la décision préfectorale. Assurément, les pouvoirs publics s’appuient sur la délimitation du DPM (Domaine Public Maritime) datant de 1992, les paillotiers sur celle fixée en 2010. Alors, où s’arrête vraiment ce DPM ?
- Selon les paillotiers, le gouvernement souhaite réaffirmer son autorité, contestée en Corse après la vague récente d’assassinats et d’attentats. Ce coup de force de l’État serait le résultat direct du passage du ministre de l’Intérieur sur l’île en novembre dernier. Inadmissible selon Ange Astrié, président du collectif des paillotiers « Manuel Valls s’en prend à ces structures pour faire croire que l’autorité de l’État va être rétablie en Corse, alors que 100 meurtres restent non élucidés. »
- Des portes de sortie ont déjà été trouvées ailleurs. Il y a l’exemple des cités balnéaires de Saint-Tropez ou Pampelonne, où des solutions juridiques ont été mises en place pour permettre l’installation de paillotes durant toute l’année. Autre illustration avec l’un des gérants d’une paillote directement concernée dans cette affaire, Ange Istria, qui souligne le fait que l’État veut annihiler les paillotes de Coti et pas les autres. Il demande des mesures valables pour toutes, de Capo di Feno aux Sanguinaires, jusqu’en Balagne où les autorisations d’occupation temporaire (AOT) vont de deux mois à dix ans.
- L’emplacement des cinq paillotes concernées :
Afficher Les paillotes de Coti-Chiavari sur une carte plus grande
[toggle title= »Qu’est-ce que le Domaine Public Maritime ? »]
En France, le domaine public maritime (dit « DPM ») vise le régime juridique du sol (sables ou sédiments en général) et du sous-sol de l’estran, des eaux intérieures et de la mer territoriale, ainsi que des parties de l’ancien DPM qui se sont rehaussée au-dessus du niveau de la mer.
Les occupations du domaine public maritimes sont régies par l’article L-2122-1 du Code Général de la Propriété des Personnes Publiques, qui dispose que : « nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public…. « .
Les autorisations d’occupation temporaire (AOT) du domaine public maritime se présentent sous la forme d’un arrêté préfectoral qui est délivré au pétitionnaire après instruction du service gestionnaire du domaine public maritime de la Direction Départementale des Territoires et de la Mer (DDTM) de Corse du Sud.
Il ne peut exister d’autorisation tacite dans la mesure où la réglementation prévoit que toute activité est interdite sur le domaine public maritime, sauf ce qui est expressément autorisé.[/toggle]