Par Omar Belkaab & Camille Malnory

Un passé ouvrier commun mais une histoire politique très divergente. Comparer le Pays-Haut (nord de la Meurthe-et-Moselle) et la Moselle-Est revient à étudier l’un des cas sociopolitiques les plus singuliers de la région Lorraine.

Pourquoi comparer ces deux régions ? En Lorraine, le Pays-Haut et la Moselle-Est sont deux espaces très semblables par leur passé ouvrier. Dans le premier, « l’activité s’est essentiellement concentrée autour des industries sidérurgiques » affirme Pascal Raggi, historien à l’université de Lorraine. Dans le second, l’économie était portée par les mines de charbon principalement.

Population ouvrière en Moselle et Meurthe-et-Moselle

 

Dans le Pays-Haut et la Moselle Est, la population ouvrière est plus importante quand les autres espaces des deux départements.

 

 Orientations politiques opposées

Ces deux espaces si ressemblant présentent au moins une différence notable : leur orientation politique. Dans le Pays-Haut, la gauche radicale est fortement implantée tandis que l’extrême droite enregistre des scores électoraux importants en Moselle Est selon les chiffres du gouvernement.

Le vote Front de Gauche en Meurthe-et-Moselle (présidentielle 2012)

 

Dans le Pays-Haut (nord du département), le parti de Jean-Luc Mélenchon a fait mieux que son score national dans la plupart des communes en 2012.

Le vote Front National en Moselle (présidentielle 2012)

 

Dans la plupart des communes de Moselle Est, Marine LePen a dépassé son score national à l’élection présidentielle de 2012
Pascal Raggi, professeur d’histoire à l’université de Lorraine à Nancy, rappelle que le Pays-Haut a accueilli « un grand nombre d’immigrés au début du vingtième siècle ». La majorité d’entre eux étaient Italiens. Ces derniers « fuyaient le régime fasciste au pouvoir à Rome à cette époque » explique le politologue et directeur du Centre Européen Universitaire, Etienne Criqui. Ces immigrés italiens se sont ainsi rapidement tournés vers le parti communiste et la CGT.

En Moselle Est, l’histoire ne s’est pas déroulée de la même manière. La région est beaucoup plus imprégnée d’une tradition chrétienne sociale démocrate à l’allemande. Les syndicats ouvriers se sont donc organisés autour de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC). Un aspect religieux qui explique en partie l’attachement politique à droite. Sans oublier qu’« en Moselle Est, l’immigration n’a pas été aussi importante que dans le Pays-Haut. Ce sont essentiellement des gens du « cru » qui y habite. » estime Pascal Raggi.

Etienne Criqui ajoute également que si l’effondrement de l’économie des mines de charbon a fortement touché la Moselle Est, « cela n’est pas l’explication principale » de la popularité de l’extrême droite dans la région.

Le politologue estime également que si le Pays-Haut fait figure d’exception, la tendance est déjà en train de changer. Il rappelle que le Front National, comme à peu près partout en France, « a enregistré des résultats importants en Meurthe-et-Moselle et le Pays-Haut n’y échappe pas ».