Il est mort, presque digne. Indigné. Une rose rouge dans la main. Une belle rose rouge. Comme un dernier geste d’espoir et d’amour envers son pays. Et les pétales qui s’envolent. Qui virevoltent. S’écrasent. Piétinés.
Il pointe le bout de son nez en 1969, enraciné dans le sol parisien, sous le nom de “Parti Socialiste”, PS pour les intimes. Il est le fruit de la création de la Section Française de l’Internationale Ouvrière (SFIO) en 1905 rebaptisée ensuite Nouveau Parti Socialiste pour finalement devenir le Parti Socialiste. Né d’un père humaniste, pacifiste et réformiste, PS porte les ambitions de ce dernier connu sous l’illustre nom de Jean Jaurès mort assassiné en 1914.
PS aussi est mort assassiné sur le front (national). On ne sait plus quand, on ne sait plus où. Il a essayé de se battre. De déployer les armes. Mais paumé dans la cohue qu’est la crise, il n’a pas su se relever au milieu des tirs croisés. A trop se dandiner sur la droite puis sur la gauche, PS a oublié les épines à sa rose. Peut-être dû à son enfance orpheline et agitée.
Adopté par François Mitterand qui le mène sur le trône démocratique entre 1971 et 1995, il passe ensuite dans les bras de Lionel Jospin entre 1997 et 2002, puis couvé par le regard idéaliste de François Hollande de 2012 à nos jours. Son ami le plus proche a souvent été désigné comme étant le Parti radical de gauche, même si d’autres comme le Front de gauche ou Europe Ecologie les Verts se laissent séduire de temps en temps par une entente cordiale.
En 2008, PS dégaine sa plume pour adopter la dernière version de sa déclaration de principe. Des promesses et de l’idéalisme en particules d’encre :
Être socialiste, c’est ne pas se satisfaire du monde tel qu’il est, c’est vouloir changer la société. L’idée socialiste relève, à la fois, d’une révolte contre les injustices et du combat pour une vie meilleure. Le but de l’action socialiste est l’émancipation complète de la personne humaine.
PS se revendique humanisme. PS se revendique altruisme. Révolutionnaire porteur de la philosophie des Lumières. Tout du moins autrefois. PS, aujourd’hui, est plutôt qualifié de « social-libéral », influencé par Manuel Valls qui mène la danse, sans mauvais jeu de mots.
Depuis quelques temps déjà, PS s’essouffle, les poumons noyés, les artères bouchées. L’air est lourd de la désillusion latente qui a gagné ceux qu’il voulait protéger. Qu’il disait protéger. Et puis les attentats. Et puis les morts. Le doute. Les angoisses. Les indignations. Le chômage. L’insécurité. La pauvreté. Le fric. Le capitalisme.
Déjà blessé, affaibli, mis à terre face à Jean-Marie Le Pen et Jacques Chirac en 2002 lors des présidentielles, PS a trimé pour revenir sur la scène politique. En 2007, c’est encore un échec aux présidentielles avec Nicolas Sarkozy en tête. Et quand enfin il revit, PS, quand enfin il remet les pieds dans le gouvernement français en maître des Champs Elysées, PS se rend compte qu’il a quitté le bac à sable. Il gueule que « le changement c’est maintenant » mais s’égratigne sur le gravier. Aux municipales 2014, il reçoit une autre mandale et voit sa popularité chuter. Chuter. Chuter. Et la nomination de Manuel Valls au poste de premier ministre n’y change rien.
Les statistiques deviennent la métaphore d’un rythme cardiaque qui faiblit. Et puis PS affronte « Charlie », PS affronte « Paris ». Des balles perdues en pleine tige. Histoire de l’achever. L’opinion publique s’affole. Conteste. Il faut voter (bleu) Marine. C’est mieux. Il faut dégager PS, Victor Hugo et Jean Jaurès. Les Lumières se sont éteintes depuis longtemps. En France, le rouge se délave. Au premier tour des régionales, les résultats montrent à quel point PS est à l’agonie. Et s’il s’en sort avec un palmarès de 5 régions au second tour, les risques étaient bien là. PS crève dans un élan suicidaire. Il délaisse les cendres de ses valeurs passées dans les urnes. PS crève et puis après ?
Post Mortem ou Post Scriptum, peu importe. L’idée est la même, ça sonne comme un épilogue. Comme un point final.