En amont du 70e anniversaire de la libération des camps d’extermination nazis, l’enquête Mémoires à Venir a été présentée ce mercredi 21 janvier. Coordonnée par la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol) et la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, le sondage interroge de nombreux faits sur la connaissance et les opinions des jeunes par rapport aux événements plus importants du XXe siècle
Avez-vous le sentiment d’avoir des connaissances approfondies sur l’extermination des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale ? C’est une des questions qui constituent l’enquête Mémoires à Venir et la surprise vient des résultats. Seulement 47% parmi les interrogés se considère bons connaisseurs du sujet. Si le regard est porté vers la France, le chiffre n’est pas plus encourageant : moins d’un Français sur deux (49%) juge avoir des connaissances approfondies sur la Shoah. Seulement 39% connaissent bien les enjeux de la Première Guerre mondiale. Le chiffre augmente un peu si on considère seulement les européens, mais ils ne sont même pas la moitié (42%) à bien comprendre l’un des plus importants événements du XXe siècle.
L’enquête a été menée auprès de plus de 30 000 jeunes (entre 16 et 29 ans), de 31 pays et a pour but d’analyser les connaissances et mémoires de cette génération par rapport à l’histoire récente.
Les génocides connus et reconnus
Même si leurs connaissances autour du nazisme ne sont pas très approfondies, la plupart ont conscience des souffrances causées par ce régime, vu que neuf interrogés sur dix ont déclaré que l’extermination des Juifs par les nazis doit être qualifiée de génocide. La majorité considère que ce terme doit être aussi appliqué au massacre des Arméniens par l’Empire ottoman en 1915 (77%), tout comme au massacre des Tutsis par le régime hutu en 1994 au Rwanda (76%). Presque tous les interrogés (92%) sont d’accord avec le fait que l’Allemagne est le principal pays responsable de la Seconde Guerre Mondiale.
Des hiérarchies de mémoire très différentes
Si les atrocités de l’Allemagne nazis font presque l’unanimité, quand il s’agit d’autres sujets, les disparités de perception selon les pays sont beaucoup plus fortes. La plupart des Français (88%) considère l’extermination des Juifs par les nazis comme le fait le plus important de la Seconde Guerre mondiale. Les Japonais assignent ce titre à l’utilisation de la bombe atomique sur Hiroshima et Nagasaki (80%) et les Russes, à la prise de Berlin par les Soviétiques (84%).
Parmi les Américains, la Shoah n’apparaît qu’en troisième lieu (60%), après l’utilisation de la bombe atomique sur Hiroshima et Nagasaki (64%) et l’attaque de la base militaire de Pearl Harbor par l’armée japonaise (62%).
On constate donc que la mémoire historique des jeunes liée à la classification de l’importance des évènements est directement corrélée avec leur appartenance nationale. Sans doute est-ce lié à l’enseignement que chacun a reçu dans leurs écoles.
Le même phénomène peut être constaté quand il s’agit de la perception des retentissements de la Première Guerre mondiale. Selon 41% des Allemands interrogés, la prise du pouvoir par les nazis est la conséquence principale de la guerre 1914-1918. Tandis que la fin de l’Empire austro-hongrois et la création des nouveaux Etats en Europe est le résultat le plus significatif pour les Autrichiens (56%), les Hongrois (47%), les Tchèques (49%), les Serbes (45%), les Italiens (42%), les Lituaniens (38%) et les Croates (35%).
La démocratie, pas non plus irréprochable
La plupart des jeunes considère que le nazisme et le communisme sont des régimes criminels, mais plus d’un tiers des interrogés (37%) trouve que la démocratie a elle aussi provoqué la mort de millions de personnes. Selon les responsables de l’enquête, cela s’explique peut-être par le fait que « les répondants ont-ils à l’esprit les victimes de la Première Guerre mondiale, dans laquelle plusieurs démocraties étaient engagées, les bombardements de Hiroshima et de Nagasaki pendant la Seconde Guerre mondiale, ou encore les périodes de la colonisation et les crises de décolonisation ».
Pas beaucoup d’espoir pour l’avenir
La plupart des jeunes se montre pessimiste quant à l’avenir, vu que la majorité (57%) d’entre eux considère qu’une Troisième Guerre mondiale est possible dans les prochaines années. Les Ukrainiens sont les plus inquiets. Ils sont 86% à croire qu’une nouvelle guerre mondiale peut bientôt commencer – une crainte compréhensible vu la situation très tendue de leur pays.