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Frédéric Lisch : « Dans 300 ans, le Fort va disparaître totalement de la surface de la planète. »

 

Bien après les derniers conflits ayant touché la région, le fort de Queuleu survit tant bien que mal aux ravages du temps. A l’heure où la France cherche à se (re)construire une identité nationale, jetons un coup d’oeil à cet élément du patrimoine militaire messin.


 

Edifié par le général Séré de Rivières entre 1867 et 1870, le fort de Queuleu est le plus grand ouvrage du stratège français. Le bâtiment fut ensuite récupéré par les Allemands après la chute de Metz en 1871, rebaptisé Fort Goeben, et fut l’objet d’améliorations techniques jusqu’en 1890. Le fort fut transformé en dernier lieu en centre d’incarcération nazi pendant la Seconde Guerre Mondiale, puis coula des jours paisibles en l’absence de conflits dans la région. Tellement paisibles que cet ancien théâtre de combats voit quotidiennement passer quelques courageux…qui profitent de son parcours de santé. « Les gens s’en foutent » regrette Frédéric Lisch, auteur d’ouvrages sur l’architecture militaire, pointant du doigt l’administration : « Depuis un certain temps, la ville ne prend pas soin de son patrimoine militaire, et c’est bien dommage. » Sa suggestion consiste à « conserver le bâtiment dans son « jus historique«  » tout en l’inscrivant dans une perspective d’utilité publique, exploitant l’espace mis à disposition pour créer des salles d’expositions ou de conférences. Juteux, mais compliqué à mettre en place, même au sein d’un territoire riche en traces d’histoire militaire

 

« Niveau budgétaire, on est du pipi de chat »

 

Le comité mosellan du musée et du mémorial de la résistance et de la Déportation a eu beau tenter de donner un second souffle aux vieux restes du bâtiment, le musée de la déportation est l’arbre qui cache la forêt…de broussailles qui envahissent les alentours des cinq anciens bastions. Une tentative de reconstitution de l’ambiance d’époque ? Non : à l’heure des restructurations militaires, le patrimoine n’a plus la cote dans la métropole messine : c’est presque une épine dans le pied du conseil municipal, entre les casernes acquises par la ville pour un euro symbolique et le manque à gagner des effectifs militaires à compenser…Les sites servant à entretenir le devoir de mémoire, une des questions centrales sur l’identité nationale, ne constituent apparemment pas une priorité de la municipalité de Metz. Un sentiment partagé par Jean-Charles Micheletti, président de l’Amicale des Déportés du Fort de Queuleu : « On a fait appel aux pouvoirs publics [Conseil Général, Régional, CA2M…] mais il semble que notre voix n’ait pas été entendue. […] Jusqu’à présent, rien n’a été fait pour la sécurité du site. » Un travail pourtant essentiel : la réhabilitation de la casemate, qui fait office de musée de la déportation, est le point de départ du parcours de mémoire du fort. Ce parcours a pour objectif de prévenir les jeunes générations que « la paix qui règne en Europe est une paix fébrile. Il est nécessaire de préserver une identité nationale. »  Finalement, la bâtisse est sortie de sa torpeur cette semaine grâce au tournage du film The Hunters, du réalisateur messin Etienne Huet. C’est toujours ça de pris.

 

A voir également : les répétitions de The Hunters, par Justine Baldin et Aurélie Bidaut !