Élue 3e ville la plus verte de France, Metz pilote plusieurs projets en accord avec ses promesses écologiques. Signé le 4 juillet 2022, un contrat liant la ville à la société Trees Everywhere marque le début des grands travaux d’urbanisme verts dans le quartier de la Patrotte à Devant-les-Ponts. Un nouvel espace végétal qui répond à la fois aux questions écologiques et sociales de la zone.
Il se trame quelque chose à la Patrotte. Le long de la Route Woippy, de grands tas de terre et des herbes folles ont peu à peu poussé du sol. Des chemins boueux serpentent au milieu de cet étrange terrain vague, antithèse du quartier résidentiel et des barres d’immeubles qui encerclent l’endroit. À en croire certains riverains, autrefois une plaque de béton habillait lugubrement le sol, stigmate d’un ancien site militaire. Pourtant d’ici quelques années, ce sera bien un tout nouvel espace forestier qui reprendra le dessus.
Après que le béton ait remplacé les buissons au cours de grandes campagnes d’urbanisation, il est à présent question de « renaturation ». La ville de Metz, sensible, lorsqu’il est sujet de feuillage, s’est lancée dans plusieurs projets, visant à implanter de nouveaux poumons verts au sein de l’agglomération. Celui de la future forêt urbaine de la Patrotte vise grand. Au-delà du fait d’ajouter une teinte verdâtre au tableau grisâtre, il s’agit de constituer un puits de captation de CO2, un refuge pour la biodiversité tout en satisfaisant les habitants des environs.
« Si l’on plante 30 000 arbres dans 35 000 communes, on obtient 1 milliard d’arbres supplémentaires en France »
Un besoin nécessaire, et des objectifs définis
« Si l’on plante 30 000 arbres dans 35 000 communes, on obtient 1 milliard d’arbres supplémentaires en France ». Tel est l’objectif de l’entreprise marseillaise Trees Everywhere à travers sa proposition lancée à l’ensemble des mairies de France, fin 2021.
« Penser la ville de demain », tel est le principe de Sophie Grenier, cofondatrice et actuelle PDG de la société. « Une forêt urbaine ne se limite pas qu’à l’aspect visuel. Son rôle s’étend jusqu’au fonctionnement des villes elles-mêmes, en proie aux changements climatiques. » Ajoute-t-elle.
60 000 arbres pour 2 hectares, une aventure inédite en France.
Le sol, livré pendant près d’un siècle au bitume, avait besoin d’un diagnostic pour évaluer son exposition à la pollution. 2 hectares séparés en 4 parcelles sont mobilisés, le béton, lui, est dégagé. Depuis mars, plus de 7 000 arbres grandissent sur une surface 2 400 m². La plantation est pour le moment expérimentale et analytique, on observe la pousse des premiers végétaux. Il s’agit d’ores et déjà d’une aventure inédite en France. 60 000 arbres d’une trentaine d’espèces différentes devraient y être plantés de 2022 à 2023.
« Les espaces verts apportent des solutions : rafraîchir la zone grâce à la rétention d’eau des végétaux ; capter le dioxyde de carbone, et offrir un endroit agréable pour les habitants et la faune sauvage. » Explique Sophie Grenier.
Rien n’est laissé au hasard. L’accent est mis sur une méthode de plantation particulière, inspirée du botaniste japonais Akira Miyawaki : une grande densité pour une grande biodiversité. Les objectifs de cette approche reposent sur la sélection d’une trentaine d’espèces locales, adaptées à leur climat nécessitant très peu l’intervention et l’entretien de l’homme. Pas question d’exploiter les ressources de la forêt, le but est de recréer un écosystème forestier autonome et durable.
« J’appelle ça le chantier vital »
Trees Everywhere a d’ailleurs trouvé d’autres communes intéressées localement, comme à Florange où 6 000 arbres sont déjà plantés au complexe de Bétange. 12 autres sur l’ensemble de la France sont favorables à l’initiative, « encore en démarrage », selon sa dirigeante. Elle ajoute :
« J’appelle ça le chantier vital, comment va-t-on parvenir dans le monde actuel à réparer tout ce que nous avons bétonné ? Il y a beaucoup de solutions qui existent aujourd’hui, c’est très encourageant. »
En attendant, il faut bien lui trouver un nom à cette forêt. Les mieux placés pour y répondre sont encore les riverains mis à contribution par la page Facebook de la ville de Metz, le 1er août. Parmi les quatre noms retenus : Forêt de la ronde, Forêt des ponts, Forêt du chemin noir et Forêt Jean Laheurte, les Messins ont à priori tranché pour la deuxième proposition.
En vert et contre toute attente
Disons-le, rien ne présageait le retour en force des écorces. L’espace connaît d’abord l’Arsenal III, un site militaire bâti en 1919. Son dernier occupant, l’Établissement Régional du Matériel de l’Armée de Terre, quitte les lieux en 1992, laissant vacant un espace de 5 hectares en milieu urbain à quelque 5 minutes du centre-ville de Metz.
L’EPF Lorraine (Établissement Public Foncier) a d’abord pour projet de recycler les bâtiments en un centre de rétention administrative. Mais les risques d’inondation étant trop importants, le projet avorte. Le terrain passe ensuite des mains du ministère de la Défense à celles de la communauté d’agglomération, qui y mène des travaux de désamiantage et de démolition sur l’ensemble des bâtiments à partir de 2011.
D’après le compte-rendu du Comité de quartier Patrotte datant de la même époque, le sort de l’ancienne friche militaire est incertain. La construction de nouveaux logements individuels est même évoquée. Ce n’est qu’après la proposition verdoyante de Trees Everywhere en 2021, que la ville de Metz change d’avis en faveur de la végétalisation du lieu.
Metz se place en bonne élève
Lorsque l’on interroge, Béatrice Agamennone, 2e adjointe au maire, elle ne manque pas de rappeler tous les efforts fournis par la ville Mosellane dans la création d’espaces verts.
« Le projet de développement de forêt urbaine existe déjà depuis le mandat précédent. On voulait renaturer la ville et créer des îlots de biodiversité. […] On a envisagé plusieurs sites au fil du temps, deux d’entre eux ont vu le jour. »
En plus du secteur de la Patrotte, le quartier de Devant-les-Ponts, a connu un autre projet de forêt urbaine au Parc du Sansonnet en octobre 2021. Ce dernier avait réuni l’association Motris (mouvement pour une transition intelligente de la société), l’entreprise Urban Forest, la Saremm (société d’aménagement de Metz métropole) et des riverains pour mettre en œuvre l’avenir du quartier. Il était alors question de 3 000 arbres de quarante espèces différentes réparties sur 1 000 m ².
Réfléchir à la ville de demain est une initiative prise très au sérieux par Metz. Cela s’inscrit plus globalement dans sa démarche de transition énergétique. La mairie actuellement affairée à son second plan Climat Air Énergie Territorial (PCAET), pense améliorer la qualité de vie de ses habitants et optimiser son budget et son attractivité économique.
Des projets qui viennent confirmer le classement tri annuel du magazine GEO plaçant la cheffe lieu de Moselle en tant que 3e ville la plus verte de France.