Au camp de Metz-Blida, près de 880 personnes installées dans ce bidonville depuis plusieurs mois attendent leur transfert. Parmi elles, Alvy*, Ousman* et Charel*. Rencontrés à l’entrée du campement, ils ont accepté de raconter leur histoire.
Des visages éteints emmitouflés dans des parkas ou encore des couvertures, c’est le triste spectacle auquel on assiste en arrivant devant le camp de Blida. Son démantèlement est annoncé à 6h ce mercredi 15 novembre. L’heure tourne et pas le moindre signe de la préfecture. L’incertitude commence à se lire sur le visage des bénévoles et des migrants.
Une traversée, au péril de leur vie
Ils ont chacun parcouru des milliers de kilomètres pour échapper à des guerres ou une instabilité politique dans leurs pays.
Pour Alvy, originaire d’Afghanistan, l’exode a commencé dès son plus jeune âge. « Quand j’étais tout petit on a eu des guerres en Afghanistan et on est parti en Iran. J’y suis resté quelques années ». Finalement arrivé en Turquie, il décide d’entreprendre un long voyage vers l’Europe. « J’ai passé plusieurs pays, j’étais en Turquie, Grèce, Macédoine, Serbie, Hongrie, Autriche, Allemagne ». Suite à ce long périple, il arrivera en France, rejoignant le camp de Blida.
Ousman a quitté son pays natal, l’Angola « à cause de problèmes politiques ». Il ajoute « je n’avais pas le choix, si je restais dans mon pays on me tuait ». Pour échapper au régime, il franchit plusieurs frontières dont celles du Rwanda ou encore de Dubaï. Il rejoint finalement Metz en mars.
Originaire de Kinshasa Congo, Charel a entrepris une traversée périlleuse de la méditerranée pour arriver en France. Il en gardera un souvenir traumatisant. « Il y avait deux zodiacs qui ont coulé dans l’eau, j’ai vu des gens mourir et vraiment ça m’est resté dans l’esprit, dans la tête et je vous parle avec chagrin ». Il atteint la France et Blida, il y a quatre mois.
Le camp de la misère
Tous témoignent d’un désenchantement en arrivant dans ce bidonville. Les conditions sanitaires se sont aggravées ces derniers mois sur le camp de fortune. Il est ainsi constitué de tentes et d’installations précaires sur un parking.
« On vit dans des conditions inhumaines, je parie qu’un chien dans vos maisons ne vit pas dans les conditions dans lesquelles nous vivons » s’indigne Charel. « Depuis que je suis arrivé là, on dort dehors, on peut rien faire » ajoute Ousman. « J’ai peur des maladies parce qu’il y a des rats partout, des insectes, de la moisissure, de l’humidité et la pluie » précise Charel. Ils reconnaissent tous le travail des bénévoles mais la qualité de vie reste déplorable. « Ils te donnent le minimum, le pain, le savon, la pâte dentifrice mais on a quand même besoin de dormir au chaud parce qu’il fait vraiment très froid ces derniers temps ». La chute drastique des températures ces dernières semaines ont rendu les conditions de vie sur le camp encore plus extrêmes. « Quand on se réveille le matin, vous regardez les bâches qui couvrent les tentes, tout est gelé ».
Attentes et perspectives d’avenir
Charel attend aujourd’hui beaucoup de la France « Je suis un demandeur d’asile, j’ai besoin de protection et il n’y a pas que la protection sécuritaire mais aussi humanitaire ». Le statut de réfugié lui permettrait d’obtenir de la part de l’Ofpra (Office française de protection des réfugiés et apatrides) un titre de séjour valable 10 ans. Mais pour l’heure, le présent lui « coupe l’appétit ».
Le démantèlement aura lieu finalement quelques heures plus tard. La trêve hivernale permettra de reloger ces personnes jusqu’au 31 mars 2018. Leur avenir est aujourd’hui plus qu’incertain.
* Prénoms modifiés
Voir aussi: Blida: démantèlement d’un bidonville d’Etat